« Till », film noir
Dozilet Kpolo
Dozilet Kpolo
Tueur en séries (Amazon, Apple, HBO, Netflix, etc.), Dozilet se fait aussi souvent des films pour pouvoir ensuite en parler.

Diffusé le 1er mars dernier à l’Institut Français, Till retrace avec mille et une émotions le lynchage de ce jeune Afro-américain dont le visage complètement défiguré fit le tour du monde.

© United Artists Releasing

« Fais attention quand tu sors ! », disent de prudentes mamans inquiètes, quant au monde extérieur et ses menaces.

Lorsque Mamie-Till Mobley (Danielle Deadwyler, vue notamment dans The Harder They Fall) met elle aussi en garde son fils Emmett « Bo » Till (Jaylin Hall, Shaft) contre le Mississipi raciste qu’il s’apprête à visiter, la jeune femme ignore que ce sont là quelques-uns des derniers conseils qu’elle lui donnera.

Retour sur ce drame basé sur une histoire vraie et ô combien traumatisante.

Et pourtant, Emmet n'avait pas fait le bo

Le jour où Emmet s'est mis dans de beaux draps. © United Artists Releasing
Le jour où Emmet s'est mis dans de beaux draps.

Adolescent de 14 ans, « Bo » mène une paisible et insouciante vie comme tout garçon de son âge ou presque. Sauf que lui est noir. Et à la veille de son voyage de Chicago vers le Mississipi, sa mère ne manque pas de lui rappeler.

Une fois sur place, une fois le coton ramassé dans les champs, au milieu d’une partie de sa famille, le garçon réalise un geste pour le moins ordinaire : un sifflement, après être sorti d’une épicerie tenue par Carolyne Bryant (Haley Bennett, Les Sept Mercenaires).

Les honteux mensonges répétés de cette jeune femme brune coûteront la vie à Bo.

Une prestation oscarisable mais bon...

Si le courage avait un visage. © United Artists Releasing
Si le courage avait un visage.

C’est un doux euphémisme de dire que la prestation de Danielle Deadwyler, en mère courage, prête à utiliser toutes les voies légales pour que justice soit rendu à son mutilé de fils, est oscarisable.

L’actrice principale réussit la mission ô combien impressionnante d’incarner la souffrance de cette mère. Dommage que l’Académie en ait décidé autrement en ne la plaçant pas dans la catégorie meilleure actrice dont la favorite est : Michelle Yeoh.

On en oublierait presque tous ces personnages secondaires tels qu’Alma Carthan (Whoopi Goldberg, Ghost), la grand-mère, Gene Mobley (Sean Patrick Thomas, Save The Last Dance), son compagnon, ou encore Moses Wright (John Douglas Thompson, Manhattan Lockdown).

C’est ce dernier, qui ce soir de 1955, contraint/forcé/menacé, ouvre la porte aux futurs meurtriers d’Emmett Till.

Mettre un visage sur un nom

L’époque à laquelle nous vivons permet entre autres de mettre un visage sur un nom. LinkedIn par exemple lance l’alerte dès que quelqu’un visite le profil. Mais on n’a pas eu besoin de ce site où tout le monde il est beau pour mettre un visage sur Emmett Till !

Aujourd’hui, l’histoire extrêmement médiatisée, à l’époque, de ce garçon battu torturé/tué par des racistes dans le sud des États-Unis résonne encore dans les esprits quand une énième violence policière envers un afro-américain fait la Une des journaux américains et internationaux. Comme ce fut le cas de George Floyd.

Mais c’est en partie grâce au combat sans relâche, partiellement documenté dans ce long-métrage de 2 heures 10, mené par la mère éplorée que le combat pour le mouvement des droits civiques a évolué aux États-Unis.

Pour la petite histoire, Carolyn Bryant, dont l’époux et son complice avaient été reconnus non coupables au terme d’une nauséabonde mascarade de justice, n’a jamais été inculpée malgré ses contrevérités.

Après avoir vu ce film noir, avec l’horrible scène dans les pompes funèbres spoiler: et ce méconnaissable corps gonflé et boursouflé, uniquement reconnaissable au toucher par sa mère, vous penserez naturellement à ces anxieuses mamans aimantes qui disent : « Fais attention quand tu sors ! »

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