« Sira » bien qui « Sira » le dernier
Dozilet Kpolo
Dozilet Kpolo
Tueur en séries (Amazon, Apple, HBO, Netflix, etc.), Dozilet se fait aussi souvent des films pour pouvoir ensuite en parler.

Disponible dans les cinémas Majestic, « Sira » est un superbe film dramatique ; sur fond de terrorisme et surtout d’histoire d’amour.

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« Jean Sidi. » Même quand elle a été violemment arrachée à sa famille, Sira (Nafissatou Cissé) n’avait que ce prénom-là à la bouche, celui de son fiancé qui n’a jamais cherché perdu espoir pendant que la jeune femme en faisait autant de son côté ; dans le désert malien, repère de sournois terroristes islamistes. Par ici, les détails.

PAS DE MARIAGE MAIS DES ENTERREMENTS

C’était censé être le plus beau jour de sa vie, et ce même sans le recours à un wedding planner qui aurait pris 10% du budget.

C’était censé être le début d’une nouvelle, avec cette union qui fleure bon la tolérance entre Sira la musulmane et Jean Sidi (Abradamane Barry) le catholique. Mais voilà des hommes armés sont passés par là, entre ces dunes où hommes parmi lesquels Moustapha (Mike Danon, vu notamment dans Bienvenue au Gondwana) et femmes avaient élu domicile ; avant de continuer leur voyage vers le village du futur époux. Loin des armes et des hommes biberonnés à de fausses croyances.

Alors plutôt que de retrouver Jean Sidi afin de l’épouser, Sira s’est retrouvée seule dans le désert, abandonnée par Yere (Lazare Minoungou) : chef terroriste la nuit et bon père de famille la journée.

Et contre toute attente, la jeune femme noire isolée s’agrippe à la promesse d’un avenir meilleur qui peine pourtant à se dessiner dans le sable chaud au point de trouver la force de se battre seule et isolée.

Mais plus elle se bat, plus l’univers lui donne des raisons de perdre tout espoir malgré quelques petites éclaircies et autres aides inattendues.

NAFISSATOU CISSÉ, RETENEZ BIEN CE NOM

Autant le dire tout de suite : le film repose sur les épaules de Nafissatou Cissé.

La Burkinabè qui fêtera ses 26 ans le 6 décembre prochain a été extraordinaire dans ce film poignant et parfois malaisant avec ces scènes d’agressions sexuelles montrées et/ou suggérées.

C’est aussi cette laideur humaine exposée qui en fait la beauté de ce nouveau film d’Apolline Traoré : Sira.

« SIRA » BIEN QUI « SIRA » BIEN LE DERNIER

Déjà auréolé de plusieurs titres internationaux, notamment l’Étalon d’Argent du FESPACO ou encore du Panorama Audience Award, au festival de Berlin, Sira n’est ni un film d’amour, ni un long-métrage sur la persévérance d’une femme pourtant lâchée en plein désert, ni encore un plaidoyer contre les groupes armés qui sévissent dans la région du Sahel.

Non, Sira ce n’est pas ça mais un mélange des trois.

Si sur IMDB, le film a une note de 6,9/10, il mériterait plus tant c'est l'un des meilleurs longs-métrages de l'année.

Parce que c’est un magnifique tour de force que la réalisatrice Apolline Traoré a réussi particulièrement en mettant l’accent non pas sur la résilience – terme galvaudé depuis que des entrepreneurs à succès ont décidé un jour d’utiliser à toutes les sauces – mais sur la ténacité d’une demoiselle en souffrance. Continuer à croire alors que la vie - pendant 2 heures et 2 minutes soit la durée du film - lui donne chaque jour un peu plus des raisons d’abandonner et rien ou presque de se réjouir.

Ce n’est pas le bruit des balles, qui sifflent à intervalles réguliers, ni les paroles fielleuses de croyants égarés qu’elle entend au final. Non.

C’est plutôt le vent qui souffle en sa faveur qu’elle entend. Avec au loin le cœur de son bien-aimé qui bat uniquement pour elle. Sira bien qui Sira le dernier.

Un peu encore et, Roméo et Juliette auraient aller pu rhabiller devant cette laissée pour morte qui n’avait qu’un seul mot à la bouche : « Jean Sidi. »

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