« Raconte-nous une blague. », demandent régulièrement d’odieux geôliers bedonnants à Arthur Fleck chaque fois ou presqu’ils le voient. Comme un tourne-disque rayé qui malgré tout diffuse de la musique. Mais voilà à force de quasiment tous les entendre pousser la chansonnette un peu/beaucoup/trop souvent, à contre-sens, Joker: Folie à Deux ressemble sérieusement à une mauvaise blague Fleck-esque. Plus de détails, par ici.
BIENVENUE CHEZ LES FOUS
New-York, années 1970. Les pantalons pattes d’éléphants balaient les bondées rues agitées new-yorkaises certes mais n’effacent pas pour autant le massacre commis quelques temps auparavant par le mauvais humoriste au visage émacié : Arthur Fleck ; bien sûr toujours campé par Joaquin Phoenix.
Dans les couloirs d’Arkham, célèbre asile psychiatrique, la personnalité publique reçoit un traitement particulier de la part des gardiens qui n’en ratent pas une pour le malmener à l’aube d’un procès qui déchaîne la foule.
Naviguant seul sur cet océan de solitude, un visage sans fard ni maquillage puis une voix particulière l’attire : Harley Quinn (Lady Gaga, A Star Is Born).
Point de départ de leurs tirades et l’Odyssée qu’ils interrompent tour à tour par des chansons/sketchs musicaux. Quand ce ne sont pas les rebondissements du procès commis par le Joker qui fait finalement son apparition.
UN PHOENIX QUI NE RENAÎT PAS DE SES CENDRES
Les 20 millions que Joaquin Phoenix aurait touchés sont un joli lot de consolation pour cette suite sans idées. Tant il est à des années-lumière de sa performance qui lui avaient valu l’Oscar du meilleur acteur en 2019.
Les 12 millions que Lady Gaga aurait touchés sont eux aussi suffisamment nombreux pour qu’elle essuie ses larmes avec quand une autre actrice principale décrochera à JUSTE titre l’Oscar de la meilleur actrice dans quelques mois.
Parce qu’il y aucun monde où Joker : Folie à Deux n’est récompensé. Aucun.
Si ce n’est ce monde imaginaire dans lequel Fleck évolue. Et encore.
ON N’A PAS EU DROIT À UN JOKER
Film le plus attendu de cette seconde partie de l’année 2024, avec Gladiator II et la masterclass à venir de Denzel Washington, fingers crossed, Joker II est un long-métrage ennuyeux et littéralement pénible à regarder et ce que l’on soit dans une salle de cinéma normale ou VIP avec ces sièges amovibles.
Peu importe la qualité de la place, le film réalisé par Todd Philipps ne nourrit que la curiosité. On était pour la plupart curieux à l’idée de savoir comment le réalisateur de Projet X, la trilogie Very Bad Trip ou encore War Dogs, allait bien pouvoir s’en sortir.
Force est de constater qu’il aura réussi l’exploit à déconnecter complètement le second volet du premier.
L’évocation tardive et juridico-pragmatique du monde dans lequel Arthur Fleck se réfugie pour oublier violences physiques et verbales, subies lorsqu’il était enfant, puis y laisse toutes ses forces déjà peu nombreuses après avoir fait monté sur scène son double maléfique, le Joker donc, est mal exploitée. Idem pour les personnages secondaires voire tertiaires.
DES PERSONNAGES RELÉGUÉS AU FOND DE LA SALLE
Là où ces afro-américaines, notamment l’assistance sociale, la psychiatre et surtout sa crush/voisine Sophie (Zazie Beetz, Atlanta), essaient de le comprendre lui et sa folie. Il y avait cette connexion qu’elles ont établie : dans le but de le sauver ou de parce qu’il était lui aussi un individu de seconde zone ?
Dans ce nouveau blockbuster qui n’est pas un, il y a une cassure surtout – spoiler alert – spoiler: quand Arthur Fleck assume publiquement ses fautes et ne renonce à enfiler la panoplie complète du révolutionnaire que des new-yorkais amassés à l’extérieur de la salle d’audience bouillent d’impatience de la lui remettre. Dès qu’il fait sa déclaration, Harley Quinn se barre d’ailleurs. CQFD.
Avec Joker: Folie à Deux, Todd Philipps peut désormais accéder facilement à la demande de ces gens qui, dans une soirée hollywoodienne et pas Diddy-esque, lui demanderont « Raconte-nous une blague. » Standing ovation.